Un Fukushima ne fait pas le printemps.
Par Florence Louis le mardi 15 mars 2011, 10:35 - Politique - Lien permanent
"La peur du nucléaire contamine le Japon", titrait hier le journal Sud Ouest. Ce n'est pas le risque, bien réel, objectif, d'une catastrophe nucléaire qui est souligné mais un sentiment, irrationnel, voire puéril.
On pouvait y lire, à propos de la centrale nucléaire du Blayais, située à 50 km de Bordeaux, à l'embouchure de la Gironde et classée par le Figaro dans la liste des quatre accidents majeurs de l'histoire :
Tout est dit. Le spectacle tourne le réel en ridicule. Les images du Japon ne valent rien face à la monnaie, sonnante et trébuchante.Les incidents nucléaires au Japon n'inquiètent pas les habitants aux alentours de la centrale nucléaire, capitale pour la vie économique du Blayais.
Et pourtant, si Tchernobyl pouvait être attribué à la désorganisation soviétique, à la vétusté des techniques d'un empire décadent (argument qui ne tient pas : quelle société peut s'enorgueillir de l'assurance de se survivre éternellement, assez pour maintenir en état des équipements technologiques ultra dangereux pour la planète?), le Japon fait partie du trio de tête des puissances mondiales. Il nous ressemble, et même, nous aimerions lui ressembler. Il a l'air d'un grand frère qui aurait survécu au pire.
Certains s'étonnent qu'après avoir subi sur leur sol le désastre des bombes atomiques, les Japonais aient opté pour l'énergie nucléaire. Mais qui décide, là-bas comme ici de développer le nucléaire ? En vertu de quelle logique ?
Certains s'étonnent que l'électricité nippone soit gérée par des entreprises privées. Les mêmes se souviennent-ils qu'EDF est désormais partiellement privatisée ? Que 22000 salariés y travaillent en sous traitance ?
La ministre de l'écologie (dont le portait figure ce mois-ci en couverture de la Décroissance)
appelle bien sûr à une "réunion de crise" : mais de quelle crise parle t-on ? Encore des gesticulations sophistiques pour éteindre la pensée qui s'éveille...
Quand les CRS sectionnent les tendons des mains des manifestants pacifistes qui ont tenté de bloquer le "train d'enfer" (contenant des déchets vitrifiés allemands hautement radioactifs) le 5 novembre 2010, ceux-ci, brûlés au 2ème et 3ème degrés, voient leur plainte contre la police rejetée. En revanche 7 militants sont condamnés à un mois d'emprisonnement avec sursis et 1000euros d'amende auxquels s'ajoutent 20500euros pour la SNCF. En matière de nucléaire, en France, la non violence est condamnée, la violence est promue.
Ni cellule de crise, ni débat médiatique sur le nucléaire ou sur l'islam : c'est une réflexion profonde, individuelle avant d'être collective, qui doit nous animer afin de repenser notre rapport au monde. Si nous savons nous orienter dans notre vie alors nous ne laisserons plus les rennes de nos existences à ceux qui n'y voient que profits. Retrouver personnellement le sens de ses activités et les inscrire dans un monde ouvert, voilà ce que nous devons réussir. La tâche est ardue mais nous sommes nombreux à nous y atteler.
J'en veux pour preuve l'ouvrage que vient de publier Stéphane FERRET, Deepwater Horizon, qui ne propose rien de moins qu'une "nouvelle" éthique, philosophie de la crise écologique. Il conclut :
Une croyance se dégage : la sphère des objets susceptibles de considération morale et juridique n'est pas la sphère de l'humain mais la sphère du monde, soit, pour la parcelle du monde qui nous occupe, la nature et les nombreux spécimens de toutes sortes qui la composent.
L'écologie est la seule alternative dont nous disposons : il est urgent de partager cette solution avec tous, car le nationalisme proposé par les LePen charme tel un serpent les populations déniaisées par cinq ans de sarkozysme. La véritable ressource est la nature, dont nous sommes. Retrouvons son sens, au quotidien et nous saurons nous battre pour survivre, en son sein.
Ainsi parlait le Japonais Masanobu Fukuoka en 1975, dans son excellente "Introduction à l'agriculture sauvage", publiée en France en 2005 par Trédaniel, La révolution d'un seul brin de paille :
NB : Merci à Banksy pour l'illustration en tête de ce billet.Dans la mesure où chacun ne transforme pas fondamentalement sa conscience, la pollution ne cessera pas.
Commentaires
La décroissance c'est le vrai sujet , comment changer notre mode de consommation des produits faisant l'objet d'une "obsolescence programmée".
j'achète une cafetière (made in china) d'une durée de vie programée de 2 ans. le bénéfice ne reviens pas à un ouvrier chinois mais à un nouveau riche chinois, ce dernier n'investit le bénéfice non pas dans son salarié mais une des produits de consommation dont l'obsolescence est aussi programmée et dans des actions sur une place de marché (française peut être) d'entreprise vendant des produit de consommation du même type.
Ce qui importe n'est pas que son produit tombe en panne, mais le bénéfice qu'il peut en tirer. Plus il diminue la durée de vie plus il en vend. Ce n'est pas pour déplaire aux nations qui vendent l'énergie pour faire fonctionner cette cafetière. ces dernière l'encourage même à faire mieux en octroyant des subventions.
plus il y a de cafetière plus il y a de centrale électrique (nucléaire ou pas). c'est le raisonnement de nom nouveau riche qui achète aussi des actions dans ce secteur. Les rendements sont satisfaisant grâce à la privatisation et aux réductions des mesures de sécurité décidé par l'actionnaire principal.
je te laisse flo le soin de faire une parenthèse avec sarko.
En conclusion, comment inverser les choses pour éviter les catastrophes comme fukushima?. Il faut voter pour ceux qui n'encourage pas la croissance. L'histoire n'apprend rien aux homme avides. Résistons !!!
Merci pour votre blog passionnant que je garde dans mes favoris. A bientôt, Marie-Laure du site www.aromathrapie-huiles-essentielles.com
La cafetière est un bon exemple : une fois posé que le café est un produit de luxe (cultivé ailleurs, donc transporté), si je m'autorise sa consommation :
- je l'achète bio et équitable (parce qu'il m'importe que l'Ethiopie par exemple continue à vivre de sa production traditionnelle sans que les paysans se ruinent la santé pour deux cacahuètes) ;
- je m'achète la cafetière la plus durable qui soit (perso la bonne vieille italienne en inox).
Et je ruine l'entreprise de cafetière pourrie prête à jeter.
Mais cela implique :
- que je ne sois pas accessible à la publicité qui m'a depuis longtemps ciblée, ménagère de moins de cinquante ans. Choisir librement nécessite de se soustraire au maximum au (neuro)marketing, qui veut me vendre une cafetière à capsules ;
- et donc d'éteindre la télé. Ça tombe bien ça économise de l'énergie...
Tous les produits de consommation sont concernés. Notre gouvernement promeut la doctrine de l'obsolescence programmée dans nos écoles d'ingénieur, lorsqu'une innovation est découverte à l'encontre de cette doctrine et du bénéfice possible, la censure apparait aussitôt, étouffant toute entreprise. Le commerce équitable est passé au travers (après une lutte acharnée), il bénéficie d'une crédibilité pour les "capitalistes" car il reprend terme "commerce", idem pour le micro credit.
En revanche je constate que depuis quelque temps, le terme "capitaliste " n'est plus utilisé dans notre vocabulaire, s'appréciant même comme une normalité depuis l'effondrement du bloc communiste.
On aperçoit toutefois une exaspération des peuples, mais démunis de solution alternative,ils transfèrent aux politiques leurs destins par leurs actions de passivité. la révolte des peuples contre les puissants est en marche et lorsque l'on s'apercevra que nous sommes (à une échelle différente) autant manipulés et soumis que les peuples qui se libère, alors viendra le l'ère de la décroissance.
Ne lâchons rien !
Chanson de Carnaval Dunkerque:
"La fumée de nos usines nous rend tous tuberculeux!
On s'en fou, on a bonne mine, nous sommes des carnavaleux !"
comment faire accepter les changements nécessaires de notre industrie, si ce n'est en créant une industrie alternative (décroissante) permettant la subsistance économique?
Biz
Je crois que c'est bien le gros problème : l'industrie. On parle d'industrialisation des services, phénomène qui explique toutes les difficultés que rencontrent les travailleurs de France Telecom et consorts.
A-t-on vraiment besoin d'une industrie ? J'y réfléchis depuis des années : si oui, alors cela justifie la nécessité d'une prise de pouvoir, celle que soutient par exemple Lutte ouvrière.
Je préfèrerai (mais c'est peut-être naïf et lâche) que nous construisions nos moyens de production, locaux et coopératifs, à côté du système capitaliste en espérant -son effondrement. De toute façon ou bien nous l'affrontons (par la prise du pouvoir politique, en Bolivie par exemple) et devons récupérer les moyens de production nécessaire à l'industrie (une industrie minimale ?), ou bien nous nous en extirpons au maximum afin de survivre quand il ne fonctionnera plus. Ou les deux...