La situation n'est en rien manichéenne. Deux hommes, un trône, la démocratie représentative et tous ses défauts, un système de corruption bien rodé ("Monsieur Gbagbo a donné aux sociétés françaises un cadeau royal : le port à Bolloré, le pétrole à Total, l’eau à Bouygues" avait rappelé en janvier Vergès sur France info), un peuple exsangue. Hervé Toutain, journaliste revenant d'Abidjan décrivait ce matin dans Cultures monde sur France Culture une ville dans un état catastrophique :  troc généralisé, crise d'approvisionnement en essence et en alimentation, fuite des populations, fermeture des hôpitaux et des écoles, un très grand nombre d'armes, politique de terreur systématique à Abobo (1,2 million d'habitants dont 300 000 en fuite), couvre-feu "virtuel" en raison des barrages montés par les (très) jeunes patriotes qui ont été armés par Gbagbo et "qui font régner leur loi"...

Abobo où il ne reste plus que des femmes. Ce sont elles qui doivent gérer les tirs de roquette qui tombent dans les cours et les enfants qu'il faut bien nourrir.

La Côte d'Ivoire n'est pas sortie du chaos qui la ronge depuis plus de dix ans. La guerre civile gagne et l'ONU tarde à s'y intéresser : bien sûr nous n'avons pas affaire à un Khadafi qui écrase son peuple. Ici c'est la pourriture du régime, les "habitudes" prises par une Afrique sub-sahariennes martyrisée (enfants soldats, exils de populations entières...) qui refont surface. C'est justement parce que la solution n'est pas donnée qu'il faut la chercher. Le silence qui entoure l'enfoncement de la côte d'ivoire dans le chaos est à la fois déchirant et indécent. Le souhait que vient d'exprimer Sarkozy d'un renforcement de l'Onuci aura, espérons-le, l'avantage de ramener le drame ivoirien au cœur des préoccupations.