Plate-forme féministe contre le projet de constitution
Par Florence Louis le dimanche 10 avril 2005, 14:30 - Politique - Lien permanent
Des associations de défense des femmes (Coordination des Groupes Femmes "Egalité", Femmes Solidaires, Femmes, Genre et Mondialisation d'Attac, Initiative Féministe Européenne pour une Autre Europe, Les Pénélopes, Réseau Féministes "Ruptures") présentent une pétition proposant des modifications significatives du projet constitutionnel en faveur des femmes. Elles déplorent notamment l'absence de certains droits jugés fondamentaux et soulignent le risque de régression de plusieurs droits acquis.
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Commentaires
Encore une fois, tout ceci est très beau, mais manque profondément de sens, de réalisme. Aucune des revendications qui sont faites dans cette pétition ne sont incluses dans la constitution française or les lois fançaises garantissent le droit à l'avortement, le droit au divorce... Malheureusement une loi ou un article constitutionnel n'empêchera jamais une femme de se faire battre par son compagnon et que dès lors, la majorité des femmes n'osent pas porter plainte, et ce pour deux raisons au moins: 1) le plus souvent elles sont amoureuses de celui qui les bat (sinon ce serait si simple), 2) ces femmes ne seront pas protégées efficacement de celui qui les bat si elles portent plainte. Ce dernier point est scandaleux, cependant, aucune disposition constitutionnelle n'y répondra. Il faudra trouver une solution autrement, dans le droit, l'application de la loi, la mise en place de structures d'accueil protégées pour ces femmes, car je le rappelle, une homme qui est accusé de battre sa femme ne pourra pas être mis derrière les barreaux de manière préventive, sauf si les faits sont établis ou presque, avant son procès. Dans le cas contraire il comparaîtra libre, et ceci est valable pour tout type d'accusation et c'est normal et sage d'agir ainsi. C'est le juge d'instruction qui décide de l'incarcération d'un individu, or il ne serait pas raisonnable d'enfermer quiconque est accusé de violence sur autrui. Très honnêtement, cette constitution reconnaît l'égalité homme/femme, impose le droit à un traitement identique, notamment dans le monde du travail. Ce traité pose comme non constitutionnelle toute attitude discriminante d'un employeur vis à vis d'une femme désirant un enfant. Les droits défendus dans cette pétition sont pour moi des droits sur lesquels on ne peut pas transiger, mais encore une fois 25 pays ont participé à l'élaboration de ce texte et il n'est pas forcément envisageable d'imposer à l'Irlande, à la Pologne le droit à l'avortement alors que ces pays ne le reconnaissent pas. Ces révolutions sociales, peuvent être inspirées par l'Europe, par le fait de se sentir européen, de voir ce qui se fait chez le voisin, mais elles doivent venir de ces peuples eux-mêmes. Plus la campagne avance, plus les partisans du NON s'éloignent de leurs arguments initiaux, extrêmement défendables, pour rejeter la constitution (constitution pas assez sociale), pour en arriver à dire, tous sans exception, que ce qu'il veulent, c'est imposer le modèle français en mieux. Je trouve que la France se caricaturise en enfant capricieux. En tous les cas, cela fait bien rire les Allemands et les Anglais, ce dont les français n'ont pas grand chose à faire peut-être, ce qui est dommage, parce que l'essence de l'Europe est là "Vivre avec 25 populations différentes". Honnêtement cette constitution n'est pas parfaite, mais la perfection ne sera jamais relative qu'à mon propre point de vue, or il faut concilier 450 millions d'habitants. Et si le non l'emporte en France, puis que les 4/5 des pays ne ratifient pas le oui, alors il est possible que la constitution soit révisée. Mais ce sera très long, car les gouvernements européens ont déjà mis quelques années à se mettre d'accord sur 63 pages (partie I et II), mais ce qui sera demandé, c'est de revenir sur les parties III et IV, celles qui n'ont pas été retravaillées et qui sont le fruit de 50 ans de vie économique européenne. Une refonte de ces parties nous fera perdre beaucoup d'années, tandis qu'en l'état ces traités sont suffisemment flous pour laisser la place à l'action politique. Et pour finir, si la constitution est révisée, c'est peut-être qu'elle aura été rejeté par les anglais et d'autres pays qui la trouve, dans son ensemble, trop sociale, et vu qu'actuellement les gouvernements européens en place sont majoritairement libéraux avec des idées qui vont plus loin que ce que l'on trouve dangereux dans cette constitution, je ne suis pas sûr que l'on s'en sorte gagnant. Se battre pour aller dans le bon sens, pour une Europe plus sociale, pour des droits plus grands pour les femmes et pour tout le monde, c'est une très bonne chose, mais il ne faut pas oublier que cela se fait toujours lentement et qu'il n'est pas forcément raisonnable de refuser une petit progrès qui permet de continuer le combat, car malgré tout ce traité représente un progrés par rapport aux traités précédents. C'est un peu comme si les français avaient voulu imposer une constitution et une législation de 2005 en 1789. Je ne suis pas sûr du résultat. Je déplore donc l'absence de ces droits fondamentaux dans la constitution, mais je n'oublie pas que l'Europe est multiple et qu'effectivement je ne pense pas comme un Irlandais. Cependant l'opinion d'un Irlandais vaut autant que la mienne et le but est de réussir à vivre selon des règles communes, acceptées par tous, et pas d'imposer son modèle.
Au secours, il n'est pas inscrit dans la constitution que les français auront le droit de continuer à parler français. Encore un argument pour le non. je vous le dis, cette constitution, c'est la porte ouverte à toutes les fenêtres (sic).
Je pense qu'un tel appel a d'abord pour but de rappeler qu'étant la catégorie de population la plus perméable aux régressions sociales sur le marché de l'emploi, les risques qu'entraine la constitution en la matière toucheront en premier lieu les femmes.
Je suis d'accord avec toi sur le fait que la constitution ne peut pas se permettre d'inscrire le droit au divorce ou à l'avortement au nom des Français ou des Allemands. Néanmoins, si le débat était réellement celui des peuples, à l'échelle européenne, alors nous constaterions peut-être qu'il serait l'occasion pour les Polonais ou les Portugais de revendiquer de tels droits. Je pense que les droits ne sont pas plus colorés nationalement que ne le sont les idées. Cette pétition parle en l'occurrence du droit à l'avortement parce que les associations s'inquiètent d'y voir inscrit le droit à la vie, concept qui, on le sait, sert d'argument juridique aux pro-life, anti-IVG.
Quant à la demande de souscrire à une démocratie participative paritaire, je pense que c'est plutôt une bonne idée.
Cette action m'intéresse parce qu'elle a le mérite de faire connaître un combat dont l'histoire est largement tue.
Pour dépasser le risque que tu soulèves justement, à savoir que les Français voudraient imposer à la constitution leur seule vision, il faudrait que les populations s'expriment. Je ne suis pas sure que les Irlandais ou les Italiens des couches populaires aient les mêmes idées, par contre je pense qu'ils ont les mêmes intérêts. Envisager l'intérêt des peuples d'Europe permettrait de dépasser les intérêts nationaux qui justement souvent s'opposent. OK, il faut de l'imagination mais je pense que nous n'avons plus le choix si nous voulons que quelque chose change.
Sur l'impact des changements de la vie des femmes dans les Pays de l'Est après la chute du communisme, je te propose un article, sur le blog europablues.blogspirit.co...
Attention, il est tiré du bulletin d'ATTAC, on va encore me dire que j'appartiens à une certaine société secrète....
Les portugais sont actuellement en train de faire leur révolution et beaucoup de femmes et d'hommes se mobilisent pour modifier les lois anti-avortement de ce pays, ce qui devrait bientôt être fait. Ils n'ont pas besoin que ce soit incrit dans la consitution européenne pour le faire. Les considérations soulevées par ces femmes relèvent du combat politique, pas de ce texte; ou alors il faudra prévoir des articles pour toutes les minorités, tous les citoyens qui pourraient se sentir en danger de quelque chose. On ne peut pas tout mettre dans ce texte et réellement je pense qu'il est déraisonnable, voire presque malhonnête de jouer sur ces arguments pour convaincre de voter non.
Tu noteras qu'il n'y a aucun article qui dit que la communauté européenne s'engage à ne pas refaire la Shoah. Le risque existe donc bel et bien. Il n'y a même pas d'article qui stipule que personne ne pourras m'empêcher de porter des chaussures rouges, donc peut-être qu'un jour on me l'interdira. Désolé je fais dans l'absurde et le cynisme, mais franchement ça m'énerve, parce qu'implicitement ça voudrait dire que, étant donné que ce n'est pas inscrit dans la constitution, on peut soupçonner tous les gouvernements européens, les hommes et femmes de pouvoir d'avoir des projets allant à l'encontre des femmes. Ce serait une forme de pêcher d'omission: parce que je n'écris pas que les femmes ont le droit à l'avortement dans la constitution, c'est que je suis contre et donc que je vais mettre en place une politique réduisant le plus possible les droits des femmes dont celui de disposer de leur corps. A part être paranoïaque chronique, c'est un peu abusé de jouer sur cette fibre.
Le combat pour les femmes ne peut pas être comparé à une lutte de minorités : la majorité des Européens sont des femmes. Et leur libéralisation délivre en même temps les hommes du fardeau du machisme. Je pense que si ce projet de constitution portait effectivement de véritables combats politiques, il serait autre chose qu'un résumé minoré des droits déjà existants, accompagné de la définition de politiques libérales, socle garantissant à une certaine pensée son application dans le temps.
A t'entendre il ne sert à rien d'inscrire des droits. Quand des cliniques reçoivent des bombes parce qu'elles ne respectent pas le droit à la vie, cette seule mention peut légitimement faire réagir.
Par ailleurs, comprendre que cette constitution est libérale n'est pas de la paranoïa chronique. Je constate simplement que ce qui y est écrit garantit des politiques libérales tandis que ce qui n'y est pas et avait été plus ou moins promis (voir les belles intentions de la stratégie de Lisbonne www.socialplatform.org/co... )est remis en cause avant d'avoir été mis en oeuvre.
Personnellement, je pense qu'une constitution a d'autres enjeux que de dire "ouf ! ", on a réussi à 25 à tomber d'accord pour poursuivre la construction d'une Europe libérale. Elle devrait représenter des avancées politiques dont nous pourrions, collectivement, être fiers, et la cause des femmes est un bon exemple du minimum à espérer.
Nous ne tomberons donc pas d'accord. Tu vois plus dans cette constitution un mauvais compromis, tandis que j'y vois un bon consensus.
A ce stade, tu notes tous les manques de cette constitution comme des promesses de régression sociale, tandis que je considère ces manques comme des espaces libres où la politique s'exprimera. Comme d'habitude, la vérité est certainement entre les deux. Cette constitution fige probablement moins les choses dans le libéralisme et la destruction des droits, des services publics, que tu ne le penses, tandis qu'elle permet probablement moins d'action politique que je veux bien l'imaginer ou l'espérer. Quoi qu'il en soit, nous entrons tous les deux dans un débat désormais fossé puisque nous n'en sommes plus à chercher ce qu'il faut voter, mais comment défendre le mieux possible notre conviction de vote. Tu voteras non, donc tu chercheras tout ce qui peut aller dans ce sens, tandis que je voterai oui, donc je vais chercher désormais tout ce qui peut aller dans ce sens. Le problème de cette attitude, c'est qu'elle ne repose plus sur une mise en perspective, sinon objective, tout au moins multiple de l'application du texte, mais sur une mise en perspective complètement subjective. Nous ne lisons plus ce texte que par rapport à ce que nous avons déjà choisi de voter. C'est bien normal, mais quelque peu malheureux. Bien normal parce que chacun de nous ressens la conviction qu'il s'est faite, beaucoup plus qu'il ne la réfléchit désormais. Or pour nous comprendre et continuer à ouvrir le débat, il faudrait que chacun de nous puisse expérimenter, sur le plan sensible, la conviction de l'autre, ce qui est loin d'être évident. Me dire qu'à m'entendre, il ne sert à rien d'inscrire des droits, n'est pas acceptable. Tous les droits des français ne sont pas inscrits dans la constitution et surtout pas ceux qui nous sont chers car portant sur l'égalité homme femme. Je crois qu'il faut faire l'effort, jusqu'au bout, d'imaginer pouvoir changer d'avis pour continuer à discuter et à garder un sens critique sur ce texte. On se voit mercredi.
C'est vrai que dans notre débat, nous cherchons chacun à défendre nos convictions. Mais j'imagine également changer d'avis, parce qu'il arrive que je sois convaincue par certains arguments pour le oui. Alors j'essaie de réfléchir en dehors des camps, puisqu'ils sont momentanés et artificiels.
Par exemple, je lisais Libé ce matin : une page du Président du Comité scientifique d'Atttac, dénonçant le carcan politique de la troisième partie. OK. Au verso, un professeur de l'EHESS, George DE MENIL explique que "l'entrée dans la Constitution des droits sociaux de la Charte de 1996 est capitale". Cet article est très intéressant , mais, en se plaçant dans un camp, en l'occurence celui du non, sa lecture devient stérile puisqu'elle consiste à vouloir critiquer ce qui est dit. Par contre, en le lisant de façon neutre, et en le situant par rapport à l'article du verso, on comprend que les deux ne s'opposent pas vraiment. L'un pense que les marges de manoeuvre des politiques seront limitées par le traité, le second considère que le traité est une avancée politique parce qu'il permet en instituant la charte des droits sociaux de recourir pour ces questions à une juridiction puissante, en l'occurence la Cour de Justice de Luxembourg. Au final, je note que les deux illustrent la tendance libérale à faire passer le lieu central du politique du champ des gouvernements à celui des juges.
Bref ça avance, ça avance et le fait de débattre ensemble évite en tout cas de n'écouter que les sons de cloche qu'on veut bien entendre (et qui finissent par sonner faux, à force de trop se ressembler ) !
A demain (je ne sais pas si nos amoureux pourront encore nous supporter !) !