CNE, CPE : la force d'être unis
Par Florence Louis le mercredi 29 mars 2006, 13:41 - Politique - Lien permanent
Unis pour le CNE, ils l'étaient : les parlementaires ont réussi à mettre en place un contrat qui fragilise profondément les salariés. Seulement dans les entreprises de moins de 20 salariés ? Mensonge : il faut savoir que de nombreuses grandes entreprises sont divisées en petites entités qui peuvent par conséquent embaucher des CNE.
Unis contre le CPE, nous le sommes : étudiants et lycéens consacrent toute l'énergie de leurs 20 ans dans la lutte contre le gouvernement, comme hier dans les sweet banlieues pourries. Pourquoi celui-ci reste-t-il sourd contre tous ? C'est ce que j'aimerais mettre en question ici.
Raffarin comme Villepin ont déployé jusque là toute une panoplie de réformes, qui visent un même objectif, double :
- réduire les rangs des classes moyennes ;
- diminuer drastiquement les charges de l'Etat, au mépris des besoins des plus pauvres.
Par classe moyenne, j'entends les populations qui par leur travail ont suffisamment pour vivre au jour le jour mais aussi pour envisager l'avenir sans angoisse : logement, assurance maladie, accidents du travail, chômage, retraite, économies pour assurer les études des enfants... Les réformes de la retraite, des Assedic, et la gestion actuelle de l'Assurance Maladie rendent difficile une accession massive à ces garanties. La spéculation immobilière se charge d'alourdir la misère et le coût des études des enfants. Toutes ces réformes accentuent la précarité dans le travail (CNE, CPE, travail à 15 ans, destrcution progressive du Code du travail) et rendent impossible l'obtention de prêts (seuls les prêts à la consommation sont encouragés, bien évidemment). De plus en plus de personnes se retrouvent ainsi extrêmement dépendantes d'une conjoncture économique fluctuante à très court terme. C'est précisément pour sortir de cette situation que s'était peu à peu construit ce qui est devenu après la guerre l'Etat providence, sous la pression des classes populaires. Grâce à la diffusion des pensées socialistes, les Français ont su réclamer que soient garanties leurs droits, et les gouvernements successifs ont prudemment suvi, afin d'apaiser les masses. Réduire drastiquement des droits arrachés en deux siècles ne peut se faire aujourd'hui qu'en parallèle à un renforcement des forces de l'ordre dont nous sommes témoins.
Comment expliquer cet acharnement contre la majorité des Français ? Exit les classes moyennes, exit aussi les immigrés dont la famille n'a plus droit de cité, dont la présence même est remise en cause par des pseudo analyses économiques qui ne tiennent pas compte de la courbe démographique européenne. Sous couvert de baisse du chômage et de dégrossissement de l'Etat, il s'agit d'assurer aux possédants l'accroissement de leurs richesses alors même que le système capitaliste se trouve à nouveau à un tournant critique de son histoire.
C'est l'ignorance de cette histoire qui permet la plus grande manipulation. C'est l'absence totale d'analyse du système capitaliste sur la longue durée qui paralyse toute pensée d'avenir. A ce titre, la lecture d'Immanuel Wallerstein, historien américain qui enseigne à l'EHESS, à Paris, me semble extrèmement utile. Je vous soumets quelques élements de la réflexion qu'il mène dans un court essai publié dans le recueil L'histoire continue, (éd.de l'Aube).
La question qui se pose est donc de savoir si le système historique à l'intérieur duquel nous vivons, l'économie-monde capitaliste, est actuellement sur le point (ou déjà en train) d'entrer dans une telle période "chaotique". (...) Les phénomènes normalement symptomatiques d'une phase B de Kondratiev sont les suivants : le ralentissement de la croissance de la production, conjugué le plus probablement avec un déclin dans la production mondiale per capita ; une hausse des taux de chômage en termes de travail actif salarié ; un déplacement relatif des foyers de profit, depuis l'activité productive vers les gains de la manipulation financière ; une hausse de l'endettement des États ; la relocalisation des industries traditionnelles vers des zones à moindres coûts salariaux ; une montée des dépenses militaires, dont la justification n'est pas réellement de nature militaire mais découle plutôt d'une création artificielle de demande contre-cyclique; une baisse des salaires réels au sein de l'économie formelle ; une expansion de l'économie informelle ; un déclin dans la production alimentaire à luis prix; "illégalisation" croissante de la migration Interzones.
L'actuelle phase B de Kondratiev est par conséquent prolifique en discours se souciant de la "compétitivité" et dénonçant le fardeau fiscal de l'État. Ce genre de préoccupation non seulement ne va pas diminuer, mais va certainement s'aggraver tout au long d'une phase A où vont s'affronter deux pôles de croissance en concurrence aiguë. Il faut en conséquence s'attendre à une tentative de réduction en termes aussi bien absolus que relatifs du nombre de cette couche moyenne participant aux processus de production (y compris dans les industries de services). Il y aura également une poursuite des tentatives actuelles pour réduire les budgets de l'État, ce qui à terme va plus que tout encore menacer le statut de ces mêmes couches moyennes.
Les retombées politiques de ces coupes sombres chez les classes moyennes vont être sévères. Édu-quées, habituées au confort et aux loisirs, les couches moyennes, se voyant sous la menace de devenir déclassées, ne vont pas accepter passivement une telle récession de leur statut et de leurs revenus. Elles avaient déjà montré les dents un moment durant la révolution mondiale de 1968. Pour les calmer, des concessions économiques leur furent octroyées entre 1970 et 1985. Les pays concernés sont actuellement en train d'en payer la facture, et de telles concessions seront difficilement reconductibles - dans le cas contraire, elles pèseraient lourd dans la balance de la lutte économique entre l'Union européenne et le condominium Japon-États-Unis. Dans tous les cas de figure, l'économie-monde capitaliste sera abrupte-ment confrontée au dilemme de choisir entre le fait de limiter l'accumulation du capital ou de devoir subir le retour de bâton de la révolte politico-économique de ces anciennes couches moyennes. Dans les deux cas, la coupe sera amère à boire.
Commentaires
quel est le remede à la "non activité" des jeune qui ne sont pas diplomés.
je constate que par PRINCIPE beaucoup de jeune sont contre. Personne, dans le camp de constestation ne propose d'idées pour repondre : AUX MESURE A METTRE EN PLACE CONTRE LA NON ACTIVITE DES JEUNE QUI NE SONT PAS DIPLOMES.j'en arrive au sentiment de dégout de TOUTE "LA" classe politique qui ne preocupe que d'une seule chose: conserver le pouvoir au prochaine election.
nous ne sommes pas dans le pays du consensus,
chirac bientot 50 ans de vie politique
mitterant +50ans de vie politiaue
Giscard + 50 ans de vie politique
et les autres................
ou sont les representant des mouvement syndical representatif de la population?????
parce qu'aujourd'hui je pense qu'il ne sont pas trés representatif des salariés!!!
quand oserons nous mettre au placard tous ces arivistes du pouvoir (politique et syndicaux)???
prenons le pouvoir !!! aux armes!!
Je ne suis pas persuadé que la "non-activité" concerne seulement les jeunes non diplômés, Nous avons eu depuis 35/40 ans une manipulation du langage, qui nous a endormi, nous laissant croire au partage des richesses, et à un rôle de l’individu reconnu de/par tous.
Cette manipulation s'est accrue durant la régence de Mitterrand, puis avec une ampleur démesurée depuis le 11 septembre.
Préalablement toute la classe moyenne a cru à un accès aux loisirs, aux conforts, et aux bonheurs du capital (possession, possession...) même les ultra socialistes.
Avoir un travail pour se payer tout ce que l'économie capitaliste nous offre (le rêve) et montrer à son voisin que l'on est devenu un "Monsieur" friqué ! (Le summum du bonheur)
--N'est-ce pas toujours d'actualité pour ceux qui ont encore la chance d'avoir pour l'instant un job "bien placé" et /ou le support des parents ? Pourquoi, faudrait-il que ceux là pensent à l’avenir ou aux autres ? : « MOI, je n’ai pas de problèmes ». —
Nous payons et paierons le prix fort de notre endormissement.
La refonte du système capitaliste doit se faire, nous avons besoin de leaders humanistes pour mener avec courage cette « révolution ». J’entends parfois (lors d’émissions radio intelligentes) des intellectuels qui réfléchissent et exposent avec brio le mouvement à entreprendre, dissèquent les incohérences, les manipulations mais, je regrette qu’ils soient trop souvent cantonnés dans leurs universités et non meneur d’un mouvement parmi la population de classe moyenne. Vous êtes peut-être étonné d’écrire un leader intellectuel parmi la classe moyenne ? Je demande cela car mettre un réformiste de la pensée et du capitalisme parmi la classe dominante du capital surabondant, me semble peine perdue.
Ces gens là, sont tellement sûrs de leurs idées, pour protéger leur bien, qu’ils ne veulent jamais se remettre en cause. Pour eux, ceux sont les autres qui ne comprennent rien, là tout est dit , le discours qui s’en suit n’est plus qu’une cacophonie de termes à la mode, de phrases impersonnelles et faussement prometteuses de jours meilleurs pour ces « pauvres gens » qui ne comprennent rien au système du capital.
de quel humanisme ? , quand le politique est l'esclave du systeme d'economie de marché, sur-marketé, si bien qu'il se transforme lui aussi, en un produit, une idée. Son accession au pouvoir devient son seul objectif (un peu comme un commercial a pour finalité,la signature d'un contrat juteux).
"Ce mec, il nous vendait de l'intelligence, il avait pas un échantillon sur lui"Coluche .
les Syndicats ne sont pas trés representatif des NON FONCTIONNAIRES, comment puis je leur donner un quelconque crédit ?(je travaille dans le privé); Désolé mais les seuls privilèges que nous avons sont axés sur le capital.
Les syndicats sont ils representatif de tous actifs, ou seulement des fonctionnaires !! Et ils viennent nous donner des lecons sur la précarité. Je suis issue d'une cité prolétaire, j'ai connu l'echec scolaire, l'alcool, la drogue et le surendettement, et je sais qu'une petite partie de ces jeunes, ceux qui connaissent vraiment "LA " précarité, ceux qui n'ont pas eu le droit d'exprimer leurs propres choix dans les orientations de vie, ceux qui on été mainte fois trahis par tous les bords, je sais que bien souvent, Ceux qui tendent la main pour l'ascensseur social ne pas toujours ceux qu'on croit!
je pense qu'au travers de cette crise, se sont encore et toujours les meme qui expriment leurs mecontements, et qu'il n'est pas sûr que ca aide vraiment la cause, mais plutot la dessert.
moins de Stress!!
plus de Caresses
Tout d'abord bravo pour le blog, et l'article sur la prostitution est vraiment touchant. Je réagis sur cet article car je me demande moi aussi quand va arriver le retour de baton dont vous parlez. Ce n'est pas un patron qui fait vivre des miliers d'employés, ce sont des miliers d'employés exploités qui font vivre comme un roi le patronnat....certains ferait bien de ne pas l'oublier, car sans pouvoir d'achat plus d'acheteur, et sans acheteur plus de vendeur...et plus de "roi". L'optimisme me fait avancer et esperer, je vous en souhaite autant pour la continuation de ce blog.
Louis
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Un commentaire sur le CNE et le CPE
Une remise en cause progressive du Code du travail, lequel oblige à justifier un licenciement par un motif réel et sérieux et à utiliser une procédure simple mais respectueuse du salarié.
Le CNE (contrat nouvelles embauches) a été créé par l'ordonnance n°2005-893 du 2 août 2005 (en pleines vacances d'été). Equivalente à une loi, une ordonnance est prise par le pouvoir exécutif (gouvernement) qui se substitue au pouvoir législatif (parlement). Une procédure sans débats et sans vote de l'Assemblée nationale et du Sénat et donc contraire à la démocratie.
Le CNE comme le CPE suspendent pendant les deux premières années l'application du Code du travail en matière de licenciement (articles L. 122-4 à L. 122-11, L. 122-13 à L. 122-14-14 et L. 321-1 à L. 321-17).
Ces contrats permettent ainsi de licencier sans motif et de façon expéditive alors que le Code du travail oblige à justifier un licenciement par un motif réel et sérieux et à utiliser une procédure simple mais respectueuse du salarié.
Avec le CNE et le CPE, l'employeur peut licencier de façon arbitraire ou pour un motif illicite : demande de paiement d'heures supplémentaires, grève, opinions syndicales ou politiques, maladie, femme enceinte, aspects de la vie privée, refus du harcèlement, ...
A voir ici :
travail-chomage.site.voil...
Voir aussi :
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